Quand il me voit, il en reste bouche bée. Je rougis. Il me fixe de haut en bas, sans dire un mot.

-        -  Hey Alex, on commande des pizzas ou pas ? Alex ?

Je vois Ed arriver dans mon champ de vision.

-        -  Oh, salut Charlie ! ça va ?

-        -  Oui et toi ?

-        -  Hum, Alex, tu peux arrêter de baver et la laisser entrer la pauvre ? Tu es magnifique en passant, me dit-il avant de retourner au salon.

Alex se racle la gorge et se décale pour que j’entre.

-        -  Il a raison Cha, tu es magnifique.

-        -  Euh… Merci… Ma mère s’est un peu amusée…

-        -  Il faut que j’aille mettre le gâteau au frigo ? demande-t-il en fuyant mon regard.

-        -  Oui, répondis-je dans un souffle.

Il me le prend des mains et j’enlève ma veste. Je rejoins Ed sur le canapé.

-        -  Comment ça pas avant 22h ?! Vous êtes sérieux ? Non, laissez tomber.

Il raccroche et balance son téléphone sur la table.

-        -  Un problème ?

-        -  Ouais, le gars des pizzas peut pas nous livrer avant 22h et même pas toutes les pizzas !

-        -  Il vous en faut combien ?

-        -  Pas beaucoup c’est juste en complément. Je dirais 6, voire 8 maximum. Pourquoi ?

-        -  Ça peut se faire … Alex ! l’appelais-je.

-        -  Ouais ? crie-t-il de sa chambre.

-        -  Je reviens, dis-je en me levant pour le rejoindre.

Il est torse nu en train de mettre une chemise. Je vire au rouge pivoine avant de me retourner.

-        -  Désolée.

-        -  C’est pas grave, tu m’as déjà vu en pyjama ! Donc, qu’est-ce qu’il y a ?

-        -  Tu as beaucoup de choses dans tes placards ou pas ?

-        -  Euh, pas des masses pourquoi ?

-        -  Il y a un problème avec les pizzas donc je me suis dit que je pouvais en faire si ça peut vous arranger…

-        -  Euh, ouais, pourquoi pas mais tu vas pas te taper à les faire toute seule !

-        -  Ça ne me dérange pas tu sais…

-        -  Ouais mais même. Je termine de me préparer et on va acheter tout ce qu’il nous faut, d’accord ?

-        -  Ça me va !

Je retourne à la cuisine et ouvre les placards. Il n’a presque rien. Il nous faut au moins 2 kilos de farine, du coulis de tomate, du fromage et des champignons.

-        -  Il faut que ce soit prêt pour quelle heure ? demandais-je à Ed.

-        -  21h grand max pourquoi ?

-        -  On va y arriver ! dit Alex en entrant dans la pièce. On y va ?

-        -  Oui, je sais tout ce dont on a besoin.

-        -  Parfait. Ed, tu gardes la maison ? On va faire des courses.

-        -  Euh, ok !

On prend nos vestes et on sort. Le magasin au coin de la rue est heureusement encore ouvert. On arrive à la caisse les bras chargés.

-        -  Alors les jeunes, on prépare la Saint Valentin ? nous dit le vieux cassier avec un clin d’œil.

-        -  Hum. Non, on fait juste une soirée, répond Alex en se grattant la nuque.

-        -  Ah, amusez-vous bien alors ! reprend-t-il avec un autre clin d’œil.

Je fronce les sourcils. On prend nos sacs et on rentre.

-        -  Il était vraiment bizarre, dis-je à Alex.

-        -  Ouais !

On se regarde et on explose de rire. Je crois que ça a dissipé notre malaise du début de soirée. Nous arrivons et nous nous mettons directement au travail. Je fais la pâte pendant qu’il prépare les garnitures.

-        -  On va peut-être éviter la bataille de farine aujourd’hui ! me dit-il.

-        -  Ça m’arrangerait ! Tu sais que j’en ai retrouvé dans ma chambre tout à l’heure ?

-        -  Désolé ! rigole-t-il. On s’est bien amusé.

-        -  Oui.

On sonne. Il me laisse pour aller ouvrir. Il revient avec 5 personnes.

-        -  Bon, Cha, tu connais déjà Bryan et Jared, donc je te présente Anna sa copine, Emily que tu as déjà vu de loin et Arthur un pote de Ed et moi.

-        -  Enchantée, souris-je en rougissant.

Ils viennent tous me faire la bise et ils vont discuter au salon. Anna reste avec moi pour m’aider.

-        -  Tu es la copine d’Alex c’est ça ? me demande-t-elle gentiment.

-        -  Non ! Non, je suis juste une amie.

-        -  Ah, désolée ! Je pensais que… Excuse-moi.

Elle a vraiment l’air sincère.

-        -  Ce n’est rien, souris-je.

-        -  Vous vous connaissez depuis longtemps ?

-        -  Non, depuis le mois de septembre. Il a lancé son ballon de foot dans la salle où je travaillais.

Elle explose de rire.

-        -  Désolée, mais je sais combien ils sont chiants avec le foot, quand il y a un match de l’équipe de Chicago à la télé, ils s’installent devant et tu ne peux pas les faire bouger du canapé, même pour manger !

-        -  A ce point là ?

-        -  Oui, je te jure, on dirait des petits vieux !

On rigole et on termine les pizzas que l’on met au four. Je ne pensais pas que j’arriverais à parler aussi bien avec quelqu’un que je ne connaissais pas il y a un quart d’heure. Je pense qu’Alex y est pour quelque chose, il me donne un peu plus confiance en moi. Ça fait du bien à vrai dire de parler avec des gens extérieurs à notre vie, c’est comme une bouffée d’air frais. Nous nettoyons un peu et nous allons rejoindre les autres au salon. Alex est collé à Emily. Ma respiration se coupe un seconde. Je les fixe seulement quelques instants, puis je m’installe à côté d’Anna et nous discutons. Elle n’est pas à la fac, elle est esthéticienne dans un salon. Elle m’explique comment elle a rencontré Jared, il y a 2 ans, puis certaines anecdotes sur les garçons, dont certaines sur Alex qui me font bien rire. Nous mangeons les pizzas puis les garçons jouent à la console. Emily joue avec eux, entre les jambes d’Alex. Arthur a visiblement perdu, puisqu’il vient nous voir.

-        -  Alors les filles, ça va ?

-        -  Ouais, répond Anna.

-        -  Et toi, Charlie c’est ça ?

-        -  Oui.

-        -  Tu es à la fac ? Je ne t’ai jamais vu.

-        -  Oui, je suis en première année de Lettres Modernes.

-        -  Ok, c’est pour ça alors, me sourit-il. Je suis en deuxième année de Physique Chimie. J’étais dans leur classe avant mais j’ai redoublé ma première année alors voilà.

-        -  Pourquoi ? Si ce n’est pas trop indiscret, rougis-je.

-        -  T’inquiète, rigole-t-il. C’est un secret pour personne. Je sortais trop, j’ai foiré mon année, c’est tout.

-        -  D’accord.

-        -  Alex m’a dit que c’était toi qui avait fait toutes les pizzas et le dessert.

-        -  Oui, j’adore cuisiner. Mais Anna m’a aidé pour les pizzas.

-        -  Ouais enfin j’ai étalé le coulis de tomate, rien d’extraordinaire ! D’ailleurs, en parlant de dessert, on le mange ? Alex !

-        -  Ouais, allez-y.

-        -  J’y vais, dis-je en me levant vers la cuisine.

Je sors le gâteau du frigo et me retourne. Je manque de le renverser en tombant nez à nez avec Alex.

-        -  Ça va ?

-        -  Oui, et toi ?

-        -  Oui, ils sont sympas tu as vu ?

-        -  Oui, Anna est très gentille, Arthur aussi.

-        -  Oui. Désolé je te laisse un peu toute seule, mais je…

-        -  Ne t’inquiète pas, le coupais-je en souriant. Tout va bien.

-        -  T’es au top Cha, dit-il en m’embrassant sur le front.

Il repart au salon et je le suis avec le gâteau. Alex le découpe et nous sert.

-        -  Putain, comment c’est trop bon ! Charlie, sans déconner, tu veux m’épouser ? rigole Arthur.

Je rougis jusqu’aux deux oreilles. Je crois qu’Alex le voit.

-        -  Hey oh, moi aussi j’ai participé ! Tu veux pas m’épouser moi ?

-        -  Mais si mon amour.

Ils se sautent dessus. Tout le monde rigole, je les suis timidement. Alex me lance ensuite un clin d’œil. Je le remercie d’un sourire. Il retourne s’asseoir en effleurant mon épaule. Même si ses amis sont gentils, j’ai besoin de savoir qu’il est là, ça me rassure. C’est un peu ma bouée de sauvetage.

-        -  J’avoue qu’il est vraiment délicieux les gars, nous dit Anna.

-        -  Merci, souris-je.

Ils doivent tous à en être à leur troisième ou quatrième bière, et le niveau sonore commence à monter d’un cran. Emily prend idée de mettre de la musique. Elle commence à danser collé serré avec Ed, puis elle tire du bras Alex qui lui saisit la taille. Anna prend alors ma main et m’emmène danser. Je suis un peu timide, même si je fais de la danse, je n’aime pas être observée.

-        -  J’ai fait de la danse quand j’étais petite, me crie-t-elle. Je crois que j’ai des restes !

-        -  J’en fais depuis 10 ans, lui dis-je. Et oui, tu as même de très bons restes.

-        -  Non !! Fais-voir !! Tu fais quoi ?

-        -  J’ai fait du classique et maintenant je fais du moderne. Et toi ?

-        -  Juste moderne ! Tu sais faire des pointes ?

Je souris. Je me mets progressivement sur la pointe de mes orteils, puis sur la pointe du plus gros.

-        -  Trop bien !! Je veux faire pareil !

Elle essaye plusieurs fois, me tombant dessus à chaque fois. Elle explose de rire. On continue à danser toutes les deux, et je me sens bien. Mais je commence à fatiguer. Je cherche Alex des yeux mais je ne le trouve pas. Je regarde mon téléphone et vois qu’il est 2h23. Je vais rentrer je pense. Je vois Ed assis sur le canapé, une bière à la main.

-        -  Ed, excuse-moi, mais est-ce que tu as vu Alex ?

-        -  Ouaip ! Il est rentré dans sa chambre avec Emily y a un quart d’heure pourquoi ? 

-        -  Tu t’en vas ?

-        -  Oui je… Mes parents doivent s’inquiéter.

-        -  Ok, à lundi.

Je vais dire au revoir à Anna.

-        -  Non !! C’est trop bête que tu partes je t’aime bien moi !

-        -  Moi aussi je t’aime bien, à bientôt.

-        -  Hep Louloute, tu t’en vas comme ça ? me demande Arthur en me saisissant par l’épaule.

-        -  Oui, je vais rentrer.

-        -  Je prends ma veste et je te raccompagne.

-        -  Non, ce n’est pas la peine, ne te dérange pas pour ça.

-        -  Non, vraiment, je ne vais te laisser rentrer toute seule à cette heure-ci.

-        -  Merci, c’est gentil de ta part.

Je dis au revoir à tout le monde et nous partons. Il fait un froid glacial dans les rues.

-        -  Au fait je ne t’ai pas demandé, ça fait longtemps que vous vous connaissez avec Alex ?

-        -  Non, depuis la rentrée de Septembre, vous aviez balancez votre ballon dans ma salle.

-        -  Ah oui, c’est vrai, désolé, rigole-t-il.

-        -  C’est rien.

-        -  Pourquoi est-ce que tu es tout le temps toute seule alors ?

-        -  Euh je… Je ne sais pas, je suis un peu trop timide je pense, et puis les autres me trouvent bizarre.

-        -  Qu’est-ce qu’ils sont cons ! Tu habites loin de chez Alex ?

-        -  Non, à une dizaine de minutes.

-        -  Ok.

-        -  Tu connais Emily ?

-        -  Oui, elle est dans la classe des garçons. Mais je ne l’aime pas trop, un peu trop collante à mon gout, dit-il avec une grimace.

Je rigole.

-        -  Tu n’étais pas obligé de me ramener tu sais ?

-        -  Si, je n’allais pas laisser une jeune-femme rentrer seule chez elle à 2h du matin dans les rues de Chicago, et puis ils ont tous un peu trop bu.

-        -  Merci beaucoup.

-        -  C’est rien, sourit-il en mettant les mains dans ses poches. Alex m’a dit que tu étais adepte du je fais tout moi-même.

-        -  Oui, en quelques sortes. J’aime faire mes vêtements, au moins je sais qu’ils sont à ma taille et ils me reviennent bien moins chers, et puis je peux faire ce que je veux. Pareil pour la cuisine, je sais ce que je mets dedans, et puis j’aime ça, ça me vide la tête, c’est un peu mon défouloir. Vous c’est le foot, moi c’est ça, souris-je.

-        -  C’est toi qui as fait cette robe ?

-        -  Oui.

-        -  Elle est magnifique, comme toi d’ailleurs.

Je croise ses yeux bleus.

-        -  Merci, rougis-je en détournant la tête.

-        -  Désolé, je voulais pas te mettre mal à l’aise.

-        -  Ce n’est rien.

Nous gardons le silence jusqu’à ce que nous arrivions devant ma porte.

-        -  Tu vas rentrer tout seul ?

-        -  Oui, t’inquiète, je crains rien.

-        -  D’accord. Merci beaucoup de m’avoir ramenée, et puis, d’avoir discuté avec moi.

-        -  C’est rien, tu es une fille super, ça m’a fait plaisir. A lundi Charlie.

-        -  A lundi Arthur.

Il m’embrasse sur la joue et s’en va, les mains dans les poches. Je rentre. Ma mère s’est endormie devant la télé, surement en m’attendant. Je vais m’asseoir à côté d’elle et caresse sa joue pour la réveiller.

-       -   Maman, chuchotais-je, je suis rentrée.

-       -   Charlie ? ça va ? ça s’est bien passé ? demande-t-elle pâteuse.

-       -   Oui, très. Vas te coucher.

-       -   Oui, tu as besoin de quelque chose ?

-       -   Non, je vais me faire une tisane et aller au lit. Bonne nuit maman.

-       -   Bonne nuit Charlie.

Elle m’embrasse sur le front et va dans sa chambre. Je vais dans la cuisine et fais chauffer de l’eau.